Après deux opus canoniques ayant redéfini le néo-rétro, Square Enix revient aux origines du mythe avec Octopath Traveler 0. Disponible depuis peu, ce volet « préquelle » avait la lourde tâche de justifier son existence sans trahir l’essence de la saga. Verdict après une quarantaine d’heures passées à sillonner Orsterra sur PlayStation 5 : la magie opère plus que jamais.
Dès les premiers instants, le constat technique est sans appel : le moteur HD-2D atteint avec cet épisode sa pleine maturité, marquant une évolution spectaculaire par rapport à ses prédécesseurs. Si Octopath Traveler II avait déjà placé la barre très haut, ce volet intitulé « Zero » tire pleinement parti de la puissance de la PlayStation 5 pour offrir un rendu tout simplement somptueux. L’expérience visuelle ne se limite plus à un hommage rétro ; elle devient une proposition artistique moderne et vibrante. Les jeux de lumière dynamiques, la gestion subtile de la profondeur de champ et la richesse des effets de particules lors des combats créent de véritables tableaux vivants d’une beauté à couper le souffle. Le joueur se surprendra souvent à marquer une pause, simplement pour contempler la mélancolie d’un coucher de soleil sur des ruines ou admirer les reflets complexes dans l’eau d’un donjon souterrain. Cette excellence esthétique est soutenue par une fluidité exemplaire : le titre maintient un taux constant de 60 images par seconde, tandis que la définition 4K rend hommage à chaque pixel de ce travail d’orfèvre. C’est un véritable « bonbon visuel » qui démontre avec brio que le pixel-art, lorsqu’il est porté par une direction artistique de ce calibre, n’a absolument rien à envier aux blockbusters photoréalistes actuels.
Cependant, une belle coquille ne serait rien sans une âme, et c’est précisément sur le plan narratif que Octopath Traveler 0 surprend le plus agréablement. Loin de la structure parfois décousue des précédents volets, où les destins des huit héros peinaient souvent à se croiser de manière organique, cet épisode propose une narration beaucoup plus centrée et émotionnelle. Pour la première fois dans la série, le joueur incarne un protagoniste unique et personnalisable, le fameux « Zero ». Son objectif est clair et fédérateur : reconstruire sa ville natale, Wishvale, ravagée par une tragédie passée. Cette quête de restauration, intimement liée aux thèmes universels de la vengeance et du pardon, ancre le récit dans une réalité touchante et immédiate. L’écriture gagne en finesse, offrant aux compagnons que l’on recrute une véritable raison, tangible et urgente, de se battre à nos côtés. L’intrigue globale se suit avec un plaisir non dissimulé, car on se sent personnellement investi dans le sort de cette communauté naissante. Chaque victoire n’est plus seulement un gain d’expérience, mais une étape vers la renaissance d’un foyer, donnant une saveur particulière à la progression.
Côté gameplay, cette cohésion narrative se traduit par une boucle de jeu enrichie et addictive. La formule « Break & Boost » demeure le cœur palpitant des affrontements, conservant son aspect stratégique et grisant, mais elle est ici sublimée par de nouvelles synergies entre les huit membres de l’équipe, renforçant l’idée d’un groupe uni. La grande nouveauté qui bouleverse la routine habituelle du J-RPG réside toutefois dans la gestion de la ville. Voir Wishvale évoluer, tant visuellement que fonctionnellement, grâce aux efforts du joueur et aux PNJ recrutés, apporte une profondeur inédite. Ce n’est plus seulement de l’exploration pour le combat, mais de l’exploration pour la reconstruction. Enfin, l’expérience est magnifiée par les spécificités de la PS5 : l’absence totale de temps de chargement fluidifie le rythme, tandis que l’utilisation subtile des retours haptiques de la manette DualSense — notamment lors des impacts des grosses attaques ou des bris de garde — renforce considérablement l’immersion physique dans les combats. Square Enix livre ici une copie quasi parfaite, capable de ravir aussi bien les vétérans de la franchise que les nouveaux venus cherchant une porte d’entrée magistrale dans cet univers.
Ce que j’aime :
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Une direction artistique HD-2D à tomber par terre, le plus beau de la série.
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L’histoire principale, plus personnelle et émotionnellement très forte.
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La mécanique de reconstruction de ville qui apporte une vraie fraîcheur.
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Le système de combat au tour par tour, toujours aussi tactique et jouissif.
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La bande-son orchestrale, épique et mélancolique à la fois.
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Techniquement irréprochable sur PS5 (4K/60fps, chargements éclairs).
Ce que j’aime moins :
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Quelques pics de difficulté qui obligent à un peu de « farming ».
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La gestion de l’inventaire qui devient vite chaotique avec le craft de ville.
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Certains dialogues annexes un peu verbeux qui cassent parfois le rythme.

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