Sorti tout récemment (le 4 décembre 2025), le DLC « Lost Memories » marque le retour du studio Odencat dans l’Underworld, cet univers aussi brutal que touchant qui nous avait laissés en larmes lors de la sortie du jeu de base. Si Meg’s Monster était une claque narrative sur la paternité improvisée et le sacrifice, cette extension promettait de lever le voile sur les zones d’ombre du scénario. Alors, simple bonus pour fans nostalgiques ou véritable épilogue indispensable ? J’ai relancé Steam, préparé les mouchoirs, et voici mon verdict.

Cinq destins, une tragédie commune
Il est impératif de préciser d’emblée un point crucial : bien que Lost Memories soit techniquement une préquelle constituée de cinq histoires courtes, il est absolument nécessaire d’avoir terminé le jeu de base pour en saisir la portée. Lancer ce DLC sans connaître la fin de l’aventure de Roy et Meg serait non seulement du gâchis, mais vous exposerait à des spoilers majeurs qui ruineraient l’expérience originale.
L’écriture d’Odencat brille ici par sa maîtrise du format court. Nous ne suivons plus le duo principal, mais une galerie de personnages secondaires dont le passé restait flou. On découvre ainsi les origines de personnages comme le combattant de MMA luttant pour son frère malade, ou encore l’enfance tragique d’un « enfant monstre » élevé en laboratoire. Ce changement de perspective est rafraîchissant. Là où le jeu de base était une longue fuite en avant linéaire, Lost Memories agit comme une mosaïque narrative. Chaque vignette apporte une nuance de gris supplémentaire à cet univers où la frontière entre « humain » et « monstre » est constamment brouillée.
L’ambiance est, sans surprise, douce-amère. On retrouve cette patte artistique en pixel art toujours aussi expressive, capable de faire passer une émotion complexe par une simple animation de regard ou un changement de posture. C’est minimaliste, mais terriblement efficace. Le tout est porté par une bande-son qui, fidèle à la réputation du studio, appuie là où ça fait mal avec des mélodies au piano qui vous resteront en tête bien après l’extinction de l’écran.

Un gameplay en retrait pour une narration au sommet
Si vous cherchiez de la profondeur stratégique ou des combats au tour par tour complexes, vous faites fausse route — mais vous le saviez déjà si vous avez aimé le jeu original. Lost Memories assume encore plus radicalement son statut de « roman visuel interactif ». Les phases de gameplay sont réduites à leur plus simple expression : quelques choix de dialogues, de rares interactions contextuelles et des combats qui servent avant tout la mise en scène plutôt que le challenge.

L’expérience est courte, comptez environ deux heures pour boucler l’ensemble des cinq histoires. Certains pourraient trouver cela léger pour une extension, mais le rythme est maîtrisé. Il n’y a pas de remplissage inutile, pas de grinding forcé. C’est une capsule narrative concentrée. On pourrait reprocher une certaine inégalité entre les segments ; l’histoire du chercheur et de l’enfant de laboratoire est poignante et densifie considérablement le lore, tandis que d’autres segments, bien que sympathiques, ressemblent davantage à des scènes coupées qu’à des arcs narratifs complets.
Cependant, la force de ce DLC réside dans sa capacité à recontextualiser l’aventure principale. En voyant ce que ces personnages ont traversé avant de croiser la route de Roy, leurs actions dans le jeu de base prennent une tout autre dimension. C’est là le tour de force d’Odencat : transformer un DLC préquelle en un outil qui enrichit rétroactivement votre souvenir du jeu original. C’est un adieu au monde de Meg’s Monster fait avec respect et tendresse.
Meg’s Monster: Lost Memories est une lettre d’amour aux fans du jeu. Ce n’est pas une extension qui révolutionne la formule ou ajoute des heures de contenu ludique, mais c’est un complément narratif essentiel pour quiconque a été touché par l’histoire de Roy et Meg. C’est court, c’est dense, et c’est parfaitement exécuté pour ce que c’est : une dernière plongée mélancolique dans l’Underworld avant de tourner la page définitivement.
Ce que j’aime
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L’écriture toujours aussi juste, qui évite le pathos facile tout en étant émouvante.
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L’approfondissement du lore et des motivations des personnages secondaires (notamment les antagonistes).
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La bande-son, toujours aussi sublime et immersive.
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Le respect total de la chronologie et de la cohérence avec le jeu de base.
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Un prix très doux (environ 5€) tout à fait honnête pour la durée et la qualité proposée.
Ce que j’aime moins
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L’expérience est très courte (2 heures grand maximum).
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Le gameplay est quasi-inexistant, encore plus que dans le jeu de base.
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Une ou deux histoires un peu en deçà des autres en termes d’intensité.
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Nécessite impérativement d’avoir fini le jeu de base (ce n’est pas un point d’entrée).

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