Après un premier volume qui posait avec une finesse remarquable les bases d’une romance émergeant du silence et des quiproquos liés à la surdité, Our Love Language revient avec un second opus qui propulse ses personnages au cœur d’un nouveau tumulte : celui de la scène et de la reconnaissance publique. Ce n’est plus seulement la difficulté à entendre l’autre qui met le couple à l’épreuve, mais bien la peur de le perdre sous les feux de la rampe.
Ce tome 2 fait prendre un virage audacieux au récit, en mettant en lumière Fujinaga. Animé par un désir d’expression viscéral, le jeune homme décroche un rôle significatif dans l’adaptation théâtrale d’un manga populaire. Cette immersion dans le monde des Arts & Spectacles offre une toile de fond fascinante : le corps et la voix de Fujinaga, si précieux dans sa relation avec Keito, deviennent soudainement un objet d’admiration pour une foule d’étrangers.
L’excellence de ce volume réside dans l’exploration psychologique du personnage de Keito. Sa joie initiale face au succès de son partenaire se mue rapidement en une morsure d’angoisse. Le résumé éditeur le souligne parfaitement : « Keito serait-il jaloux ? » La réponse est bien plus complexe qu’un simple sentiment possessif. Elle touche à la peur primale de voir son cocon intime brisé, de voir l’objet de son affection s’éloigner, happé par le talent et l’adoration du public.
L’auteur gère cette jalousie avec une maturité étonnante. Il ne s’agit pas d’un simple triangle amoureux, mais d’une lutte interne pour Keito : comment communiquer une peur si irrationnelle à Fujinaga, lui qui est enfin en train de s’épanouir pleinement ? C’est là que le thème initial de la communication prend tout son sens. Si le langage des signes et les mots ont établi leur lien, comment trouver le « langage » capable d’exprimer une émotion aussi complexe et potentiellement destructrice que l’inquiétude de l’abandon ?
Au-delà de l’intrigue romantique, Our Love Language T.2 est un manga sur l’épanouissement individuel au sein du couple. Le succès de Fujinaga n’est pas un obstacle à leur amour, mais un catalyseur pour la croissance de Keito, qui doit apprendre à faire confiance et à laisser son partenaire briller, même si cela le rend plus visible, donc plus vulnérable, aux yeux du monde.
Graphiquement, l’ouvrage maintient sa patte : un dessin sensible, axé sur les expressions faciales et le langage corporel, essentiels pour transmettre l’inexprimable dans un récit où le silence pèse lourd. Les scènes de théâtre sont particulièrement réussies, contrastant l’intimité des coulisses avec l’éclat (et le danger) des projecteurs.
Ce deuxième volume de Our Love Language réussit l’exploit de complexifier la relation de ses héros sans tomber dans les clichés. Il interroge la place de l’individu dans la dynamique amoureuse et prouve que la plus grande épreuve de la romance n’est pas de se trouver, mais de s’autoriser à grandir chacun de son côté, en ayant toujours l’autre comme ancre. Un indispensable pour les lecteurs qui apprécient les BL psychologiquement riches et sensibles.

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