Bon, j’avoue tout de suite : si on m’avait dit un jour que je me retrouverais à aider une gamine de 13 ans à résoudre des énigmes en pixel art tout en naviguant dans ses rêves les plus bizarres, j’aurais probablement levé les yeux au ciel en marmonnant un vague “encore un point-and-click qui va me frustrer à la première serrure sans clé”. Et pourtant… Lucy Dreaming, c’est un peu comme tomber dans un lit moelleux rempli d’humour anglais, de nostalgie rétro, et de mystères bien ficelés. Et une fois qu’on y a goûté, difficile de s’en sortir. Même avec un seau d’eau froide.
Tout commence avec Lucy, une ado rouquine à lunettes qui vit dans une petite ville anglaise nommée Figgington – déjà, rien que le nom donne envie de se faire une tasse de thé. Le problème de Lucy ? Elle est victime de cauchemars à répétition. Pas les petits trucs du genre “j’ai oublié mon devoir de maths”, non. On parle de chutes interminables, de cris dans la nuit, de souvenirs enfouis qui grattent sous la surface. Et plutôt que de se contenter d’un gros dodo sous une couverture en laine, Lucy décide d’apprendre à contrôler ses rêves pour aller au fond du problème. Littéralement.
On se retrouve donc face à un point-and-click bien rétro, avec tous les ingrédients du genre : objets improbables à ramasser, dialogues à choix multiples, combinaisons absurdes qui finissent parfois par marcher (oui, on peut résoudre un casse-tête en collant une affiche avec du sirop de betterave). Mais ce qui m’a accroché dès les premières minutes, c’est le ton du jeu : Lucy parle souvent à haute voix, commente tout avec un petit côté sarcastique, brise le quatrième mur comme si c’était une porte de placard mal fermée… Et ça fonctionne. On rigole, on sourit, on s’attache.
Graphiquement, le jeu est un hommage assumé aux classiques LucasArts. C’est du pixel art, certes, mais super propre, coloré, et plein de petits détails rigolos. Les environnements sont variés : la chambre de Lucy, son école, le musée local, les endroits visités en rêve… Et surtout, la musique suit : un mélange de nappes étranges, de sons old-school bien dosés, et même des options pour les fans de Roland MT-32 (nostalgie, quand tu nous tiens). À noter que le jeu est entièrement doublé, et les voix sont top. Mention spéciale pour l’accent anglais de Lucy, à mi-chemin entre Hermione Granger et une punkette de Liverpool.
Mais le vrai cœur du jeu, ce sont les rêves. Grâce à un oreiller spécial, Lucy plonge dans des mondes oniriques qui ont tous un lien avec sa vie réelle – ou son passé enfoui. Et ce qui est malin, c’est que certaines actions dans un rêve peuvent influencer la réalité, et vice-versa. On joue donc avec les deux dimensions pour progresser, un peu à la manière d’un Day of the Tentacle moderne. Et croyez-moi, combiner une limonade pétillante avec un moulin à vent dans un cauchemar pour libérer un souvenir d’enfance, ça n’a jamais été aussi logique.
Le jeu n’est pas trop difficile, mais il demande quand même un minimum de réflexion. Les énigmes sont parfois farfelues, mais globalement cohérentes. Et si on bloque, Lucy nous balance souvent une petite réplique pleine de second degré qui donne un indice sans jamais nous prendre pour des idiots. En plus, il y a une carte pour se déplacer facilement, un inventaire clair, et surtout pas de pixel hunting insupportable comme à l’époque de Broken Sword.
En une dizaine d’heures, j’ai fait le tour de l’aventure, en m’amusant du début à la fin. J’ai ri, j’ai eu quelques petits frissons, et j’ai franchement eu envie d’applaudir les développeurs de Tall Story Games, un tout petit studio indé qui prouve qu’on peut encore faire de grands jeux avec peu de moyens et beaucoup d’idées. Et cerise sur le crumble : le jeu est entièrement traduit en français depuis juillet 2025, avec une localisation pleine de malice. Ils n’ont pas juste traduit, ils ont adapté l’humour, les jeux de mots, les références. Du travail d’orfèvre.
Alors voilà. Lucy Dreaming, c’est comme une de ces vieilles boîtes de biscuits anglais : un peu poussiéreuse en apparence, mais pleine de surprises sucrées à l’intérieur. Si vous aimez les aventures un peu étranges, les dialogues croustillants, et les mystères servis avec une bonne dose de thé noir et de sarcasme, foncez. C’est un rêve que vous n’aurez pas envie de quitter.
No responses yet