Si on m’avait dit qu’en 2024, je serais captivé par l’univers sombre et boueux des luttes sociales dans la Varsovie du début du XXe siècle sous l’occupation tsariste, j’aurais probablement ri ou affiché une mine perplexe. Et pourtant, The Thaumaturge de Fool’s Theory a réussi à me faire plonger tête la première dans cet univers. Comment ? En y ajoutant une touche de mysticisme, des choix moraux complexes, une intrigue captivante… et beaucoup de boue.

Vous incarnez Wiktor Szulski, le thaumaturge éponyme, un homme capable de percevoir et d’interagir avec des démons appelés Salutors. Chaque thaumaturge, en atteignant l’âge adulte, est lié à un Salutor qui se nourrit d’un défaut spécifique de son hôte. Pour Wiktor, ce défaut est l’orgueil, lui permettant d’agir avec une fierté parfois drôle ou bénéfique, mais souvent problématique. Au fil de l’histoire, vous rencontrerez d’autres Salutors, chacun lié à un nouveau défaut, ce qui enrichira à la fois votre arsenal et l’impact de vos choix dans le jeu.

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En tant que thaumaturge, Wiktor dispose également de dons de perception uniques qui lui permettent de lire les empreintes laissées sur les objets. En touchant un livre, par exemple, il peut non seulement identifier la dernière personne qui l’a manipulé, mais aussi ressentir ses pensées et émotions à ce moment précis. Cette capacité fait de Wiktor un Sherlock Holmes aux pouvoirs surnaturels, capable de résoudre des mystères en examinant minutieusement des objets et des scènes de crime.

Le jeu vous entraîne dans une Varsovie isométrique où chaque quartier offre des indices et des secrets à découvrir. L’histoire principale suit Wiktor dans son enquête sur la mort de son père, cherchant à comprendre les circonstances et les acteurs derrière cet événement tragique. En chemin, diverses factions influenceront son périple, tantôt en l’aidant, tantôt en le manipulant, enrichissant une intrigue déjà bien dense.

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Le combat alterne avec les phases d’enquête, car Wiktor croise souvent des individus peu enclins à tolérer sa curiosité. Ces affrontements, au tour par tour, se déroulent sur une scène distincte. À chaque tour, Wiktor peut utiliser l’une de ses compétences de combat et mobiliser l’aide de son Salutor. Vous pouvez choisir d’infliger des dégâts bruts ou d’utiliser des compétences pour réduire la concentration de vos ennemis. Une fois leur concentration réduite à zéro, ils deviennent vulnérables, ce qui permet à Wiktor et à son Salutor de déclencher une attaque dévastatrice. Le système intègre également des états positifs et négatifs, ainsi que des attaques différées, vous obligeant à surveiller à la fois l’ordre des actions et votre barre de santé.

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Ce système de combat se révèle particulièrement efficace. Bien qu’il commence de manière assez simple, il gagne progressivement en difficulté et en complexité. Certains ennemis disposent de traits spécifiques dès le début d’un combat, pouvant perturber vos plans. La seule solution pour neutraliser ces traits est d’utiliser un Salutor adapté à la situation. Les adversaires varient également dans leurs approches : certains privilégient des attaques fréquentes mais peu puissantes, tandis que d’autres préparent des coups dévastateurs après plusieurs tours, obligeant à rester vigilant.

Des combats de boss s’ajoutent à la formule, notamment lorsque vous cherchez à capturer un nouveau Salutor, introduisant une dynamique encore plus stratégique. Chaque affrontement demande une attention constante, du début à la fin, pour ajuster votre stratégie. Bien qu’il soit tentant de vous reposer sur des tactiques familières, le jeu vous pousse parfois à les abandonner pour élaborer de nouvelles approches en fonction des défis spécifiques. Cela maintient une tension constante et un engagement fort à chaque combat.

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Le jeu repose sur un vaste arbre de compétences dédié à Wiktor et à ses Salutors, offrant une progression continue. Chaque action de Wiktor — qu’il s’agisse de lire un document, d’analyser une situation grâce à sa Perception ou de remporter un combat — lui rapporte de l’expérience. Lorsqu’il accumule suffisamment d’expérience, il monte de niveau et gagne un point de thaumaturge à investir dans cet arbre. Celui-ci est divisé en quatre branches : cœur, esprit, action et parole. Débloquer des compétences dans ces sections améliore ses capacités dans ces domaines spécifiques, augmente sa santé ou débloque de nouvelles options de combat. Ces options incluent de nouvelles attaques ou des améliorations pour les compétences existantes, qui peuvent recevoir des effets secondaires stratégiques. Cela enrichit encore la profondeur des combats, tout en renforçant la sensation que Wiktor évolue en tant que thaumaturge au fil de l’histoire.

Visuellement, le jeu est parfois impressionnant. L’utilisation d’une perspective isométrique pour les explorations de Wiktor met en valeur les détails lorsque c’est nécessaire. Par exemple, les jeux de lumière sont particulièrement réussis, avec des rayons de soleil magnifiant les flaques boueuses des zones les plus sombres. Les modèles de personnages, bien que moins détaillés que dans certains jeux AAA, sont suffisamment soignés pour ne pas nuire à l’immersion ou à la narration.

Côté audio, le doublage est d’excellente qualité, ce qui est remarquable compte tenu de la variété des choix possibles dans le jeu, chacun entièrement doublé. L’ensemble est réaliste et captivant. La musique, étrange et rythmée, qui accompagne les combats, reste facilement en tête et contribue à renforcer l’atmosphère unique du jeu.

En termes de performances, The Thaumaturge offre une expérience mitigée. Les combats sont fluides et percutants, offrant une satisfaction constante grâce à leur exécution précise. Les modèles des personnages principaux sont globalement bien synchronisés avec le doublage, ce qui renforce l’immersion. Cependant, des ralentissements peuvent survenir lors des voyages rapides, bien que tout se stabilise une fois les éléments de l’environnement chargés. On note aussi des animations parfois comiques des PNJ d’arrière-plan, visibles lors des dialogues ou des combats. Ces petits détails prêtent davantage à sourire qu’ils ne gênent réellement l’expérience.

Un point de frustration réside dans la progression de l’arbre de compétences.Bien que j’aie récupéré presque tous les objets de collection et accompli toutes les quêtes secondaires, il m’a été impossible de maximiser l’arbre de compétences avant la fin de l’histoire. Cela s’est révélé problématique dans le dernier acte, certaines options de dialogue finales étant verrouillées par des niveaux insuffisants en Cœur, Esprit, Action ou Parole. Cela a conduit à une fin qui, bien qu’intense et puissante, m’a semblé moins satisfaisante, comme si le contrôle m’avait échappé. De plus, l’absence de sélection de chapitre limite les opportunités de rectifier cette situation sans s’appuyer sur des sauvegardes manuelles, une contrainte qui semble inutilement rigide.

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Si on passe ses défauts, l’expérience globale reste très positive. J’ai été captivé par le monde richement construit, fasciné par l’histoire de Wiktor et sa relation complexe avec son don et son Salutor. L’intrigue est jalonnée de rebondissements, portée par des personnages crédibles aux objectifs et allégeances variés. Le mélange entre exploration et combats s’intègre parfaitement à la mécanique centrale de la thaumaturgie, créant un équilibre harmonieux tout au long de l’aventure.

Je ne pouvais m’empêcher de continuer à jouer, avide de découvrir tous les mystères et contenus annexes. C’est une aventure fascinante, où enquête et surnaturel s’entrelacent brillamment. Certes, quelques défauts techniques subsistent, mais ils n’entachent pas ce qui reste une histoire prenante et bien conçue. Je recommande vivement ce jeu à quiconque apprécie une narration riche et une touche de mysticisme.

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