La version originale d’El Shaddai: Ascension of the Metatron était un jeu hack’n slash 3D emblématique qui fusionnait habilement différents genres. Elle proposait des séquences où le gameplay passait de la 3D à des plateformes en 2D, ainsi que des moments de simulation de marche pour contraster avec l’action frénétique.
À sa sortie, El Shaddai n’a pas réussi à se distinguer parmi la multitude de jeux d’action des années 2010. Face à des titres tels que Castlevania: Lords of Shadow, Dante’s Inferno, la série Devil May Cry, Ninja Gaiden et Darksiders, ce jeu au style artistique singulier et aux mécaniques minimalistes a eu du mal à se faire remarquer. Pourtant, ceux qui y ont joué ont été marqués par ses visuels élégants et intemporels ainsi que par sa grande diversité de gameplay.
Aujourd’hui, un jeu comme El Shaddai: Ascension of the Metatron trouve un écho plus favorable auprès des joueurs que dans les années 2010 sur PlayStation 3 ou Xbox 360. Les joueurs sont désormais plus enclins à découvrir des expériences d’action expérimentale offrant des styles artistiques uniques et des récits non conventionnels. Comment cette interprétation surréaliste du livre apocryphe d’Enoch est-elle perçue aujourd’hui ? La version Nintendo Switch est-elle à la hauteur ? Découvrez-le dans ma critique de El Shaddai: Ascension of the Metatron HD Remaster !
C’est dans les pages de l’Ancien Testament que l’on découvre les créations divines et les anges, chargés de veiller sur l’humanité, s’inquiètent de son évolution. Ils décident alors d’intervenir en conférant aux humains une portion de la sagesse divine. Ainsi naissent les Nephilim, des êtres hybrides mi-anges mi-humains, une transformation qui perturbe tellement Dieu qu’il envisage de réinitialiser le monde par un déluge… mais avant de le faire, il confie à Enoch la tâche de ramener à la raison le conseil des anges qui l’a trahi.
Initialement un simple scribe, Enoch est choisi par le Seigneur pour administrer une leçon sévère à ces anges déchus. Lucifel, un Grigori également connu sous le nom de Lucifer avant sa chute, accompagne Enoch dans sa quête. Dans El Shaddai, il n’est pas encore le diable, mais plutôt un compagnon bienveillant qui aide Enoch et informe Dieu de ses progrès.
L’histoire tourne autour du périple d’Enoch à travers le monde, affrontant les anges rebelles et les Nephilim. Au fil du voyage, on découvre l’histoire des Grigori et leur affection pour l’humanité. Il semble que le joueur soit chargé de la mission de Dieu, qui consiste à nettoyer le monde des créatures devenues déviantes, avant que Dieu n’appuie sur le bouton de réinitialisation, et c’est au joueur d’actionner ce bouton.
El Shaddai: Ascension of the Metatron se distingue par son utilisation minimale de cinématiques. Cela peut sembler surprenant pour un jeu de la septième génération, une période où les jeux cherchaient souvent à égaler les films dans leur présentation. Les rares cinématiques présentes sont toutefois mémorables, mais la narration principale se déroule généralement à travers des voix off pendant l’action, ou lorsque Enoch lit des parchemins.
Cependant, la véritable faiblesse de l’histoire réside dans le personnage d’Enoch lui-même. Il reste énigmatique, ne s’exprimant jamais, à l’exception d’une seule réplique entendue lorsque sa santé est critique. C’est un choix délibéré de la part des concepteurs, mais il aurait pu offrir un potentiel de conflit plus profond entre le personnage et sa mission. En fin de compte, Enoch semble simplement exécuter les ordres qui lui sont donnés, sans remettre en question sa propre volonté.
Lucifel devient progressivement l’un des personnages les plus attachants du jeu, et curieusement, sa personnalité contraste avec celle d’Enoch. Affable et doté d’une voix calme et séduisante, Lucifel échange des plaisanteries avec Dieu, même si la voix de ce dernier reste hors de portée. Ses interactions laissent entrevoir des conversations imaginaires captivantes. En revanche, Enoch aurait pu bénéficier d’une écriture plus développée, lui conférant une personnalité distincte plutôt que de le laisser pratiquement muet.
Les combats contre les boss Grigori révèlent des personnalités surprenamment riches. C’est l’un des éléments les plus marquants d’El Shaddai, et l’un de ces boss devient même jouable lors d’une séquence étendue. Ce personnage dépasse le simple rôle de boss, et la fin du jeu laisse un point d’interrogation autour de l’un des Grigori, ajoutant une dimension supplémentaire à l’histoire.
Au cœur de cette fascinante réinterprétation d’une séquence non canonique de l’Ancien Testament se déploie un voyage surréaliste à travers un monde imprégné d’une puissance angélique incontrôlée. L’architecture, la technologie et l’incorporation des Grigori à la nature créent une vision de la Terre qui se démarque totalement des autres jeux. Une grande partie de l’impact émotionnel d’El Shaddai réside dans ses paysages à couper le souffle et son utilisation magnifique des couleurs.
Le style graphique est un savant mélange de cel-shading, de dégradés et de shaders ainsi que de filtres picturaux impressionnistes. La conception des personnages est également singulière, rappelant une pratique courante dans les jeux japonais d’autrefois, où les artistes s’inspiraient de célébrités hollywoodiennes pour créer leurs personnages.
La présentation est indéniablement élégante, et un soin méticuleux a été apporté pour magnifier El Shaddai dans toute sa splendeur. Le contrôle de la caméra est entièrement confié aux mains du réalisateur, éliminant ainsi toute interférence des joueurs et assurant que seuls les éléments visuels désirés soient présentés. Le HUD est désactivé par défaut, libérant l’écran de tout encombrement pour garantir une immersion totale dans l’esthétique prévue par les développeurs.
Pour certains joueurs, le manque de contrôle sur la caméra peut être source de frustration, surtout pendant les phases de plateforme. Certaines sections délicates sont reléguées à des domaines optionnels. Les sauts et les déplacements sur les plates-formes peuvent varier en fonction de l’arme équipée par Enoch, car cela influence non seulement ses mouvements, mais aussi sa mobilité.
Enoch dispose d’un bouton d’attaque, et différents mouvements peuvent être effectués en chargeant les attaques ou en retardant les inputs, à la manière de Bayonetta. Le système de verrouillage et de lancer des ennemis dans les airs pour effectuer des combos est satisfaisant et brutal, surtout lorsqu’il est suivi d’une attaque chargée. Les trois types d’armes sont obtenus en les arrachant aux ennemis et en les purifiant. Les joueurs doivent être attentifs à la purification, car les armes se détériorent avec l’utilisation et leur réparation nécessite des ressources, exposant ainsi Enoch aux attaques ennemies.
Si une arme se corrompt, elle se brise et Enoch est contraint de se battre à mains nues, avec des mouvements rappelant ceux de Chun-li. Bien que le combat à mains nues soit amusant, l’inconvénient est l’absence d’un double saut aérien. Toutes les armes offrent la possibilité à Enoch de réaliser un double saut, de planer ou de réaliser un dash aérien similaire à celui de Mega Man X.
La bande originale d’El Shaddai: Ascension of the Metatron est à la hauteur des thèmes divins qu’elle explore, mêlant des chants entraînants à un piano frénétique, ainsi qu’à des influences musicales africaines. Le jeu lui-même est tout aussi riche en couches d’éléments qui semblent véritablement surnaturels.
Lors de sa sortie initiale, El Shaddai: Ascension of the Metatron au prix fort pouvait sembler un investissement excessif pour un jeu d’une durée de sept heures, avec une faible rejouabilité et confronté à une concurrence intense. À 29,99 euros, la version remasterisée HD semble plus raisonnable et offre une expérience plus fluide.
Jouer à El Shaddai en mode portable sur la Nintendo Switch est une expérience agréable. Le système de combat est facile à prendre en main et l’absence de gestion de la caméra rend le jeu très accessible aux débutants dans le genre des jeux d’action. El Shaddai: Ascension of the Metatron HD Remaster est un chef-d’œuvre audiovisuel que vous n’oublierez pas de sitôt. Il est donc compréhensible qu’il ait été restauré après toutes ces années.
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