Depuis l’explosion de la scène indé portée par le phénomène Vampire Survivors, les clones se suivent et se ressemblent souvent, noyant les stores sous des tonnes de pixel-art coloré. Jotunnslayer: Hordes of Hel prend le contre-pied visuel de cette tendance en proposant une direction artistique « Double A » beaucoup plus sombre, ancrée dans une mythologie nordique crasseuse et violente. Oubliez les sprites mignons, ici l’ambiance est lourde, les décors de Helheim sont oppressants et le sang des démons tache durablement le sol. Dès les premières minutes manette en main, le titre impose son identité : c’est brut, c’est métal, et ça ne cherche pas à faire rire.
Le cœur du gameplay respecte les codes sacrés du genre : votre personnage attaque automatiquement tandis que vous gérez ses déplacements au milieu d’une marée d’ennemis grandissante. Cependant, Jotunnslayer se distingue par sa structure. Là où d’autres titres vous demandent simplement de survivre 20 ou 30 minutes, le jeu de Games Farm incite au mouvement perpétuel via des objectifs dynamiques. Il ne suffit pas de tourner en rond ; il faut aller détruire des piliers spécifiques, occire des élites marqués ou sécuriser des zones pour faire apparaître le boss final. Cette dynamique « d’action forcée » est une excellente idée qui brise la monotonie habituelle du « kiting » passif. Sur PS5, la maniabilité est impeccable, le stick gauche répondant au doigt et à l’œil pour se faufiler dans des trous de souris lorsque l’écran est saturé d’adversaires.
Côté progression, le système de bénédictions divines fonctionne bien, même s’il reste classique. En ramassant l’expérience, vous gagnez des faveurs de dieux comme Thor, Loki ou Freyja. Les synergies sont jouissives : combiner les éclairs en chaîne de Thor avec les leurres explosifs de Loki permet de nettoyer l’écran avec une satisfaction visuelle indéniable. Les effets de particules sont d’ailleurs très réussis, donnant un véritable sentiment de puissance à mesure que votre « build » prend forme. Chaque classe (du Berserker au Revenant) offre une approche suffisamment distincte pour justifier de relancer une « run », d’autant que la méta-progression — cet arbre de talents passifs à débloquer entre les parties — est suffisamment généreuse pour qu’on ne se sente jamais totalement bloqué.
Techniquement, la version PS5 souffle le chaud et le froid. Le jeu est propre et offre une lisibilité supérieure à la moyenne du genre grâce à des modèles 3D soignés. La manette DualSense est mise à contribution de manière subtile mais agréable, avec des vibrations qui accompagnent les lourdes frappes ou l’approche des boss massifs. Cependant, le moteur Unity montre ses limites quand le chaos est total. Bien que le framerate tienne globalement la route, on sent quelques hoquets lorsque les effets pyrotechniques et le nombre d’ennemis atteignent leur paroxysme critique. Ce n’est jamais injouable, mais cela rappelle que l’optimisation sur ce genre de jeu reste un défi constant. De plus, l’interface, pensée initialement pour le PC, peut parfois sembler un peu chargée sur un téléviseur, surtout lorsqu’il faut lire rapidement les descriptifs de compétences en plein combat.
Impossible de boucler ce test sans mentionner le déploiement, ce jour même, de l’extension gratuite « The Fall of Alfheim ». Cette mise à jour majeure injecte une dose de fraîcheur bienvenue avec un nouveau biome, Alfheim, qui troque les cendres volcaniques pour une corruption arachnide oppressante. Le bestiaire s’enrichit de cauchemars à huit pattes et d’un boss Matriarche qui mettra vos réflexes à rude épreuve. Côté gameplay, l’arrivée de l’Archimage (une classe technique qui se téléporte au lieu de dasher) et de Nerthus, la déesse de la Terre capable de provoquer des séismes, ouvre de nouvelles perspectives de theorycrafting passionnantes. Un suivi post-lancement exemplaire qui densifie considérablement l’expérience sans passer par la caisse.
Jotunnslayer: Hordes of Hel est une proposition solide qui s’adresse à ceux qui sont allergiques au pixel-art ou qui cherchent une expérience plus « adulte » et structurée du bullet heaven. Il ne réinvente pas la roue, mais il la fait tourner avec une brutalité efficace. C’est un défouloir parfait pour des sessions courtes, qui parvient à capturer l’essence addictive du genre tout en y ajoutant une couche tactique bienvenue grâce à ses objectifs de mission. Il lui manque peut-être ce petit grain de folie ou d’originalité pure pour devenir un incontournable absolu, mais il accomplit sa mission de divertissement avec les honneurs.
Ce que j’aime
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La direction artistique sombre et détaillée, qui change du pixel-art.
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Le système d’objectifs et de missions qui force à bouger et dynamise les runs.
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Les synergies entre les Dieux (Thor, Loki, etc.) sont jouissives et variées.
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Une sensation de puissance (le « power fantasy ») très bien retranscrite.
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Excellente prise en main à la DualSense.
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Un contenu correct pour le prix, avec une bonne rejouabilité.
Ce que je n’aime pas
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Quelques légères baisses de framerate quand l’écran est totalement saturé.
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La musique, bien que dans le thème, devient vite répétitive et générique.
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L’interface et les menus de choix de compétences manquent parfois de clarté.
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On aurait aimé encore plus de folie dans les évolutions ultimes des armes.

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