Le genre du plateforme de précision, popularisé par des titres punitifs comme Getting Over It, trouve son nouveau masochiste mascotté. Développé par Egobounds, Egging On nous met au défi d’être, littéralement, un œuf fragile en quête de liberté. Une aventure absurde et incroyablement exigeante. Accrochez-vous, car ici, la moindre erreur vous renvoie directement au jaune.

Dès les premières secondes, Egging On pose les bases de son univers : vous êtes un œuf, récemment éclos dans un poulailler délabré, et votre seul but est l’évasion. Ce postulat loufoque sert de tremplin à une mécanique de jeu redoutable : le contrôle de la physique.

Oubliez la plateforme traditionnelle où le personnage obéit au doigt et à l’œil. Ici, chaque mouvement est régi par l’inertie, le poids et surtout, la fragilité de votre coquille. L’œuf roule, vacille, et le moindre choc contre un mur ou une chute de quelques centimètres est une menace existentielle.

Le système de saut est au cœur du challenge : pour atteindre de nouvelles hauteurs, il faut synchroniser le saut avec la roulade de l’œuf. Sautez au moment où l’œuf est sur sa pointe pour maximiser la détente et la distance. Maîtriser ce « saut du chapeau » est essentiel pour progresser dans les niveaux vertigineux.

Egging On est un véritable jeu de « rage game » (jeu de la rage), et il ne s’en cache pas. Les niveaux sont des constructions labyrinthiques qui s’étendent verticalement, vous faisant traverser un poulailler, une ferme, une usine, puis des environnements de plus en plus surréalistes, remplis d’obstacles sadiques : planches mouvantes, scies circulaires, balanciers instables, et des coqs enragés qui ne sont pas là pour vous offrir un petit-déjeuner.

Le sentiment de perte est constant. Comme dans ses inspirations, l’absence (ou la rareté) de points de contrôle fait que la moindre glissade, le saut manqué ou le basculement malencontreux peuvent vous faire dégringoler des minutes, voire des dizaines de minutes d’effort.

Et pourtant, on revient. Ce qui sauve Egging On de la simple frustration gratuite, c’est la pureté de sa mécanique et l’équité de ses défis. Si vous tombez, c’est que vous avez fait une erreur de lecture de niveau ou de timing. Chaque centimètre gagné est une petite victoire personnelle, chaque plateforme atteinte déclenche un soupir de soulagement que peu de jeux parviennent à générer.

Visuellement, le jeu opte pour une direction artistique en 3D agréable et colorée. Les environnements, bien que thématiquement liés à l’œuf, sont variés et bien éclairés, contrastant avec l’austérité de la tâche. La direction visuelle est nette et claire, ce qui est crucial pour un jeu de précision.

L’aspect le plus inattendu est peut-être la narration. Un narrateur omniscient et légèrement sarcastique vous accompagne, commentant vos chutes avec un humour noir et vous encourageant parfois de manière passive-agressive. C’est une touche de personnalité bienvenue qui allège l’atmosphère de tension.

Le jeu offre également une bonne dose de personnalisation. Débloquer de nouvelles coquilles (certaines ayant même un impact subtil sur le gameplay, comme une meilleure adhérence ou un poids légèrement différent) donne une carotte suffisante pour que les joueurs persévérants aient envie de remonter la pente avec style. L’ajout d’un mode Drone Assist pour les joueurs qui veulent juste voir la fin (ou s’entraîner sans la punition totale) est une concession intelligente à l’accessibilité, sans compromettre l’intention initiale du jeu.

Egging On s’adresse sans détour aux amateurs du genre « climbing game » et aux joueurs qui chérissent l’idée de dompter une physique récalcitrante. Le pari d’utiliser un œuf comme avatar est brillamment exécuté, rendant chaque progression tendue et chaque victoire euphorique.

C’est un jeu difficile, qui mettra à rude épreuve votre patience et l’intégrité de votre manette. Mais si vous avez le tempérament (ou le masochisme) nécessaire pour y investir des heures, le voyage absurde d’Egging On vers la liberté est une aventure étonnamment captivante.