Depuis des années, le segment du jeu de plateforme à moto est dominé par la série Trials, qui a perfectionné l’art de l’équilibre au millimètre près. Avec MotoTrials, le studio indépendant Proud Arts propose non seulement de s’attaquer à ce monument de la précision, mais y greffe une surcouche narrative sombre et oppressante, évoquant l’esthétique glaciale de Limbo et le concept brutal du « death game » popularisé par Squid Game. Un pari risqué : l’âme de Trials survivra-t-elle à cette descente aux enfers post-industrielle ?

Dès les premières minutes, MotoTrials impose sa loi : le contrôle est 100 % basé sur la physique. Ici, pas d’animations pré-enregistrées pour masquer une approximation ; le moindre degré d’inclinaison, la plus petite impulsion du joueur sur l’accélérateur ou le frein, dicte l’issue de votre tentative. Incarnant Ricky, un participant piégé dans un conteneur qui s’ouvre sur un labyrinthe industriel mortel, le défi est immédiat et viscéral.

Le gameplay est, sans surprise, extrêmement exigeant. Les circuits sont des parcours de la mort truffés d’obstacles : plateformes mouvantes, jets de flammes, ponts qui s’effondrent et presses hydrauliques. Là où Trials cherche la perfection du chrono, MotoTrials cherche d’abord la survie. Chaque échec se traduit par une mort violente – bien que non graphique dans le détail, l’impact visuel est garanti par l’atmosphère lugubre. Heureusement, le système de checkpoint instantané est l’épine dorsale de l’expérience, transformant la frustration en une boucle d’apprentissage addictive : mourir, recommencer, ajuster.

Cependant, cette rigidité physique est aussi la limite du titre. L’inertie, parfois lourde, et la nécessité d’une précision diabolique sur certaines sections peuvent aliéner ceux qui n’ont pas la patience des speedrunners.

L’innovation majeure de MotoTrials est d’avoir injecté une narration cinématographique dans un genre historiquement axé sur le score. L’environnement 2.5D est superbement rendu dans ses teintes sombres et ses lumières industrielles froides, posant un décor angoissant.

Le scénario se dévoile via des messages cryptiques et, plus efficacement, grâce à un doublage complet (VO). Les voix de Ricky, de l’alliée mystérieuse Ashley, ou encore de l’inquiétant Annonceur, donnent corps à ce jeu de la mort souterrain. Ce choix est audacieux : il donne une résonance émotionnelle à l’échec. Chaque chute n’est pas qu’un temps perdu ; c’est un pas de plus vers la déchéance psychologique du personnage.

Le seul bémol est la brièveté de l’expérience. Le mode histoire se boucle en 2 à 3 heures pour le joueur moyen. Si le développeur justifie cela par une absence de « filler » et une concentration sur l’intensité, le joueur en quête de contenu pur risque de rester sur sa faim.

Techniquement, le jeu est propre, s’appuyant sur des configurations minimalistes. L’utilisation d’IA générative pour certains icônes et écrans de chargement est une note moderne à prendre en compte, mais qui n’affecte pas l’expérience de jeu principale.

MotoTrials est un jeu pour les puristes de la physique et les amoureux de défis punitifs. Il réussit son pari de fusionner la mécanique de Trials avec une direction artistique et une ambiance narrative dignes d’un thriller psychologique. C’est un voyage court, brutal et sans pitié, qui vous met au défi de prouver, comme le suggère le développeur, que votre esprit ne peut pas être écrasé.

Note : 16/20

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