Avec Dreams of Another, le studio japonais Q-Games (derrière les excellents PixelJunk) nous livre un titre qui défie les conventions. Dès les premières minutes, le jeu pose une question philosophique simple mais déroutante : « Pas de création sans destruction ». Dans la peau de l’Homme en pyjama, votre arme n’est pas faite pour démolir, mais pour créer et révéler le monde.

Le concept de jeu est brillant : vous vous déplacez dans un environnement flou, comme un rêve à peine éveillé, rendu grâce à une technique nommée point cloud rendering. En tirant avec votre fusil sur ce chaos de points, vous matérialisez les murs, les escaliers et même les personnages. Voir le monde prendre forme autour de chaque impact est une sensation incroyablement satisfaisante, qui réinvente complètement le genre shooter à la troisième personne. C’est la mécanique centrale, et c’est elle qui donne tout son cachet au titre.

La plus grande réussite du jeu réside sans conteste dans sa direction artistique. Le style est éthéré et poétique, évoquant une peinture impressionniste numérique. C’est magnifique, surtout lorsque les formes se dessinent sous vos tirs. L’ambiance sonore, gérée par le réalisateur Baiyon, est à la fois mélancolique et enveloppante, collant parfaitement à cette atmosphère onirique.

Cependant, là où le jeu trébuche, c’est dans son rythme. La progression est souvent hachée. On passe d’une exploration fascinante à des séquences d’énigmes répétitives qui nuisent à la fluidité du gameplay – mention spéciale à l’obligation de casser des crayons plusieurs fois, qui devient vite fastidieuse. Le jeu prend parfois le joueur par la main, le forçant à avancer à un rythme d’escargot entre deux objectifs, ce qui peut rendre l’expérience plus passive qu’interactive. Heureusement, en récupérant des objets pour le Soldat Errant, on débloque des capacités vitales comme le sprint, qui améliorent grandement le confort de jeu.

Le scénario est un véritable trip psychologique qui explore la mémoire, l’existence et la nature humaine à travers l’histoire entrelacée de l’Homme en pyjama et du Soldat Errant. L’originalité vient aussi des PNJ : vous vous retrouverez à discuter avec une poubelle ou une porte, qui vous offriront des perspectives humoristiques et décalées sur la société.

Mais attention : si vous n’êtes pas friand des réflexions très cryptiques et des dialogues aux relents de pseudo-philosophie, vous risquez d’être rapidement perdu. Le jeu nous dit souvent l’histoire plutôt que de nous la montrer. Pour certains, ce sera une expérience fascinante, pleine de citations profondes. Pour d’autres, cela pourrait devenir frustrant et donner envie de passer les cinématiques.

Dreams of Another est un titre audacieux et mémorable qui ose explorer de nouvelles frontières artistiques et ludiques. Il est magnifique, doté d’une idée de gameplay brillante et d’une ambiance sonore envoûtante. C’est l’exemple parfait du jeu expérimental qui vaut le coup d’œil.

Toutefois, son rythme décousu et sa narration parfois trop vague le rendent inégal. Si vous êtes prêt à accepter les longueurs et à vous laisser emporter par son propos poétique, c’est une aventure qui vous marquera. Si vous cherchez de l’action pure et des réponses claires, vous risquez de rester sur votre faim.

Note Graphismes

Direction artistique unique (Point Cloud) ⭐⭐⭐⭐🌟 

Note Gameplay

Mécanique de tir innovante mais rythme inégal ⭐⭐⭐ 

Note Scénario

Poétique mais souvent cryptique et abstrait ⭐⭐⭐ 

Note Audio

Bande-son mélancolique et envoûtante ⭐⭐⭐⭐

Note Durée de vie

Assez court, peu de rejouabilité au-delà du NG+ ⭐⭐

Note globale : 14/20